Macron n'a pas répondu ce 6 janvier à la colère des libéraux et au désarroi des hospitaliers : il a multiplié les camouflets et recyclé de vieilles recettes.
C'est dans un hôpital touché par un attaque informatique massive que le président de la République, Emmanuel Macron, a décidé de présenter, à la fois ses vœux au monde de la santé, mais aussi sa refondation du système de santé. De fait, ce discours, prononcé au centre hospitalier sud francilien ce 6 janvier, prend racine dans un contexte sanitaire chahuté par la grève des médecins libéraux, qui réclamaient entre autres une revalorisation de la consultation à 50 euros, mais aussi par le désarroi, pour ne pas dire le désespoir des hospitaliers, confrontés à une triple épidémie de grippe, bronchiolite et covid, au bord du burn-out. On imaginait que le président Macron avait pris conscience de la détresse des acteurs de santé pour leur apporter des réponses adéquates, à même de soulager leurs souffrances quotidiennes. Que nenni. Le président Macron a distribué les baffes, et accommodé les restes. Sans oublier l'incohérence des mesures proposées, histoire d'égarer un peu plus les médecins, aides-soignants, infirmiers...
Les baffes, d'abord
Les baffes, d'abord, pour les médecins libéraux en grève : ces derniers, outre la revalorisation de la consultation, réclamaient aussi la fin de la délégation de tâches vers les paramédicaux, l'assouplissement de la permanence des soins ambulatoires, la fin de la ROSP (revenus sur objectif de santé publique). Et bien, à ces médecins, Macron leur dit merde. Sur l'allègement de la permanence des soins, Macron les tourne en ridicule : non seulement il n'a aucune intention de la rendre plus vivable, mais il compte bien mieux rémunérer les médecins qui s'y engagent. Travailler plus pour gagner plus, alors que certains médecins du collectif en grève ont des files actives deux fois plus importantes que la moyenne... Sur la délégation de taches, là aussi, Macron balance un camouflet au collectif médecins pour demain : il ne veut pas l'abroger mais la généraliser !!! Au sujet de la ROSP ? OKLM, Macron propose non pas de la supprimer mais de l'appliquer à l'hôpital public, en lieu et place de la T2A.
Réchauffer les restes
Et encore, là c'est pas tout à fait clair : car si, dans une première partie de son discours, il proposait ni plus ni moins de canceliser la T2A, en milieu de messe, il se ravise : il n'est plus question de supprimer la tarification à l'activité, mais plutôt de la coupler à une nouvelle rémunération sur objectif de santé publique. Ni vu ni connu, j't'embrouille !! Pour le reste, Macron réchauffe les restes. Il en va ainsi de la création des assistants médicaux, dont la multiplication était déjà souhaitée par le président de la république en 2019. Rien de très neuf, non plus, dans cette volonté d'organiser les professionnels de santé dans les territoires : il existes d'ores et déjà des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), des équipes de soins spécialisées, des équipes de soins primaires, des contrats locaux de santé, des conseils locaux de santé mentale... À quoi bon ajouter des conseils nationaux de la refondation (CNR) territoriaux ? Au sujet de la gouvernance, là encore Macron fait du neuf avec du vieux : il veut que chaque hôpital soit dirigé par un administratif et un médecin (quid des paramédicaux, au passage ?) : mais n'existe-t-il pas déjà un comité exécutif, qui réunit le directeur de l'établissement et le président de la commission médicale d'établissement (CME) ? Le président veut redorer le blason de la chefferie de service, mais c'est déjà inscrit dans la loi Buzyn de 2019 !! Pour les rémunération, talon d'Achille de l'hôpital, Macron promet des revalorisations des carrières, notamment pour les personnels postés, tout en restant très vague : quand y a du flou, y a un loup ! Et le président ne pouvait pas non plus s'empêcher de saupoudrer son discours de mesures libérales, en promettant la fin des 35 heures à l'hôpital, ou encore en abrogeant l'accès aux habitations à loyer modéré (HLM) aux personnels de santé. Pourquoi ? Parce que ça ne marche pas : n'oublions pas que Macron est en marche.
Et le président ne pouvait pas non plus s'empêcher de saupoudrer son discours de mesures libérales
Bref, alors que l'on attendait du président une attitude plus empathique vis-à-vis du personnel de santé, on a assisté, de sa part, à une multiplication des provocations, à un recyclage de vieilles recettes... Pas sûr que ce coup de tête calme la colère des hospitaliers et des libéraux.