Dans sa proposition de loi, une nouvelle mouture du texte présenté par Thomas Mesnier en décembre 2022, le député Frédéric Valletoux a omis de reprendre l'article de loi qui créait le statut d'infirmier référent. Bêtise du député ou trahison des infirmiers ?
Alors que les médecins sont vent debout contre la proposition de loi du député Frédéric Valletoux, laquelle proposition voudrait obliger les médecins à adhérer à une CPTS, à participer à la permanence des soins, mais aussi interdirait l'intérim pour tous les médecins et paramédicaux en début d'exercice, les infirmiers ne sont pas non plus aux anges à la lecture de ce nouveau texte législatif visant, une fois de plus, à faire reculer les déserts médicaux. Et pour cause : la proposition de loi de Valletoux est une nouvelle mouture d'une proposition de loi proposée en décembre 2022 par Thomas Mesnier, ancien député de la charente et médecin urgentiste, qui a perdu son siège à l'Assemblée nationale en janvier 2023, à l'occasion d'une législative partielle.
Faire suer les généralistes
Avant de quitter l'Assemblée, Thomas Mesnier avait confié à Frédéric Valletoux le soin de défendre sa proposition de loi. Valletoux avait joué l'apaisement face à la gronde des médecins généralistes et avait préféré retirer le texte de Mesnier. Les médecins généralistes avaient cru avoir remporté le point, alors qu'il ne s'agissait guère que d'un règlement de compte politique entre parlementaires à l'égo démesuré. Car, si Valletoux retirait la proposition de loi de Mesnier, ce n'était pas par crainte des médecins, mais plutôt parce que ce député hospitalo-centré voulait faire suer le burnous des médecins libéraux. Au passage, en piètre politique, Valletoux s'aliénait aussi le soutien des infirmiers, en omettant de reprendre dans sa mouture l'une des propositions de Mesnier, à savoir la création du statut d'infirmier référent. Tel que le stipulait le texte de Mesnier, "L’infirmier référent assure une mission de prévention, de suivi et de recours en lien étroit avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant." Considérée comme une réelle avancée pour les infirmiers, ce statut était entre autres plébiscitée par le syndicat national des infirmiers et infirmières libéraux (Sniil) : ce statut "constitue une avancée majeure dans l’organisation du système de santé et pour l’ensemble de la profession. Avons-nous besoin que le médecin renouvelle mensuellement les prescriptions quand le patient est par exemple atteint d’une plaie chronique ? Quid des patients souffrants de troubles mnésiques pour qui l’administration des thérapeutiques est vitale ? Quel temps gagné pour les infirmiers à ne pas courir après des prescriptions pour des soins qui de toute façon ne cesseront pas ? Le médecin a besoin d’être informé, mais a-t-il le temps nécessaire pour refaire les prescriptions dont les IDEL ont besoin pour la continuité des soins chez des patients chroniques ? Ce nouveau statut permettra d’assurer une prise en charge globale et coordonnée des patients, en particulier ceux atteints de pathologies chroniques, qui nécessitent un suivi régulier."
Manque de reconnaissance
Nul besoin d'ajouter que l'absence du statut d'infirmier référent dans le nouveau texte proposé par Valletoux est considéré comme un coup de couteau dans le dos de tous les infirmiers : "Cette absence témoigne d'un manque de reconnaissance du rôle clé des infirmières et infirmiers libéraux dans la coordination des soins et la prise en charge des patients. Le Sniil rappelle que les IDEL, compte tenu du maillage territorial extrêmement important de la profession, sont des atouts majeurs pour notre système de santé. Leur implication dans l’accès aux soins est donc primordiale pour répondre aux besoins de la population. Le Sniil est profondément outré par l’exclusion du statut d’infirmier référent de la proposition de loi." Plein d'espoir, le Sniil va présenter demain 23 mai à Valletoux un amendement en vue de la réintégration de ce statut dans sa PPL. On saura alors s'il s'agit d'un oubli de la part du député ou d'un choix délibéré.